La "Peur" chez le cheval
- Accepter le naturel
- La peur du cavalier
- Quand le cheval bloque Prendre le temps pour en gagner
- La gestion par le troupeau
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La "peur" chez le cheval : accepter le naturel
Le réflexe naturel du cheval quand quelque chose le surprend est la fuite. Il va fuir de quelques mètres et, à distance, observer et analyser l’objet de sa surprise. Cette distance où il se sent en sécurité est propre à chaque cheval, et avec l’expérience, il va la réduire.
Ne pas lutter contre la nature du cheval
Contrairement à nous, le cheval n’est pas un prédateur, la fuite est donc totalement normale. C’est d’ailleurs cette capacité à fuir vite qui a plu aux humains et qui nous a donné envie de le domestiquer pour profiter de cette capacité à galoper vite. On ne peut donc pas se battre contre la nature du cheval. Il faut l’accepter et l’utiliser à notre avantage.
Je sais que mon cheval va fuir. Comme je suis cavalier, je vais anticiper que quelque chose risque de l’inquiéter et qu’il aura envie de fuir. Ma première réaction sera de l’accompagner et de le laisser fuir. Plus le cheval va apprendre et réaliser que je ne l’empêche pas de fuir, moins il va fuir. En randonnée à cheval, il y a quelques cas où je ne peux pas laisser mon cheval fuir et où je dois le contrôler, dans des situations qui pourraient être dangereuses, par exemple sur la route. Mais dans 99 % des cas, si mon cheval fait quatre foulées de galop, ce n’est pas grave.
En randonnée et balade, accompagner le cheval plutôt que le contrôler
Le réflexe humain, quand mon cheval part au galop alors que je ne m’y attends pas, consiste à vouloir absolument attraper les rênes et lui arracher la bouche pour essayer de le contrôler. C’est un réflexe qu’il faut perdre. Il faut au contraire se dire « j’accompagne mon cheval ». De toute façon, je n’arriverai pas à l’arrêter si je ne suis pas en équilibre. Donc je l’accompagne, je reste calme, et je lui demande l’arrêt au bout de quelques mètres, dans le calme.
Le cheval se met en sécurité puis s’arrête pour analyser
Si j’entrechoque deux bouteilles plastiques au pré, où les chevaux sont en liberté, ils vont faire quelques foulées de galop, puis s’arrêter et se retourner vers l’objet de la surprise pour l’analyser. Ils ont le réflexe de se mettre en sécurité d’abord et ensuite de regarder. Ils ne partent pas très loin : puisqu’ils ont la possibilité de fuir, ils trouvent que quelques mètres représentent une distance suffisante pour se sentir en sécurité.
Nos balades à cheval autour de Lyon reposent sur la connaissance du cheval. La gestion de sa peur, ou plutôt de sa surprise, en fait partie : apprendre à accompagner le cheval est l’une des missions du cavalier des Grands Espaces.
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La "peur" chez le cheval : la peur du cavalier
On parle beaucoup de la « peur » du cheval alors qu’il s’agit plutôt de surprise, et très peu de la peur du cavalier. Pourtant, elles sont extrêmement liées. Le cheval étant un animal sensible, réceptif, émotif, on lui communique énormément notre propre peur.
La transmission de la peur du cavalier au cheval
Quand je m’inquiète parce que je vois un chien ou un train qui arrive, j’ai tendance à reprendre mes rênes, à serrer mes cuisses, à contracter mon bassin. Tout ça, le cheval le ressent dans mon langage corporel et ça l’inquiète. De plus, je le coince inconsciemment entre mes mains et mes jambes.
Le cheval a en fait entendu le chien ou le train bien avant son cavalier, et un cheval de randonnée sait très bien de quoi il s’agit. Pour lui, c’est la routine. Il n’a donc pas particulièrement d’appréhension par rapport au train et au chien qu’il a entendus et identifiés. En revanche, le cavalier, en anticipant une réaction qui n’allait pas avoir lieu, se contracte, reprend ses rênes, et communique tout un ensemble de stress au cheval. Le cheval ne sait ni pourquoi ni de quoi il doit avoir peur, mais ce cavalier qui s’inquiète l’inquiète.
Je fais peur à mon cheval, mon cheval se fait peur, le fait que mon cheval s’inquiète à cause de moi m’inquiète encore plus. Cela confirme dans mon imaginaire que mon cheval allait réagir au chien, alors qu’en réalité, il réagit à ce que je lui communique, pas à cet événement extérieur.
En randonnée à cheval, il doit avoir confiance en nous… Et nous en lui
Il faut donc travailler sur la confiance. En randonnée, on a besoin que le cheval nous fasse confiance, puisqu’on lui demande justement de dépasser certaines « peurs ». Parallèlement, il faut absolument lui faire confiance tout en acceptant qu’il soit cheval et qu’il ait des réactions de cheval. En fait, il faut lui faire confiance pour les compétences que nous, humains, n’avons pas : la capacité à savoir marcher vite, à choisir son terrain, à adapter ses allures… On demande beaucoup de choses au cheval, et dans 90 % des cas, c’est lui qui gère. Dans les 10 % restants, c’est nous.
Dans notre fonctionnement, avec une cavalerie qui a beaucoup d’expérience en randonnée, un cavalier débutant en extérieur va devoir oublier tous ces réflexes qu’il a pu prendre ailleurs et faire réellement confiance au cheval.
Etre référent pour le cheval
En revanche, un cheval qui a peu ou pas d’expérience en extérieur doit sentir qu’il peut me faire confiance et s’appuyer sur moi. Je dois avoir ce rôle de référent. On parle beaucoup de « travailler » les chevaux. Or, un cheval de randonnée travaille déjà assez : il parcoure 30 kilomètres par jour avec un cavalier sur le dos, sur des terrains variés, avec des allures… Mon rôle consiste davantage à créer un contexte d’expériences riches, variées et bienveillantes, où il pourra apprendre par lui-même et par le troupeau.
Pour être rassurant et référent avec un cheval, et pour éviter de lui communiquer notre peur, il faut travailler sur soi, plus que travailler son cheval. C’est déjà accepter de se remettre en question, gérer sa respiration et son émotionnel. Ce qui est intéressant avec les chevaux, c’est qu’on ne peut pas faire semblant.
Apprendre à gérer sa propre peur à cheval, à ne pas la communiquer à sa monture, est important pour des balades à cheval en toute sécurité et sérénité.
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La "peur" chez le cheval : prendre du temps pour en gagner
Quand mon cheval bloque sur une poubelle, un objet insolite, intrigant… Je peux avoir envie de me battre contre mon cheval, de « gagner » contre lui, c’est-à-dire faire un passage en force : mains, jambes, cravache, etc. Je vais me battre parce que je ne veux pas de refus.
J’aurai gagné contre mon cheval sur le moment mais en réalité, j’aurai tout perdu. Si, à cet objet qui inquiète mon cheval, j’ajoute des choses très désagréables, comme des coups de pied et de stick, non seulement mon cheval aura toujours peur de la poubelle, mais en plus, il aura peur de prendre des coups à chaque fois qu’il sera confronté à une poubelle, et à terme, il risque d’avoir peur de moi. Ce n’est donc pas un raisonnement intéressant à long terme.
En balade à cheval, anticiper sans appréhender la réaction du cheval
Par exemple, j’ai peur des araignées. Concrètement, ma peur de l’araignée n’est pas rationnelle puisque l’araignée, en France, ne risque pas de me faire du mal. Le cheval ne fait pas semblant d’avoir peur. Il a un comportement de proie, il est donc logique qu’il réagisse comme une proie face à une difficulté. Il ne réagit pas comme nous, humains, parce qu’il ne perçoit pas son environnement de la même manière : il n’entend pas les sons de la même manière, il ne voit pas comme nous. Et il n’analyse pas de la même façon que nous des objets qui nous paraissent insignifiants.
Une fois que le cavalier l’a accepté et a compris comment le cheval fonctionne, il n’a plus de raison d’appréhender sa réaction puisqu’il l’anticipe. C’est pourquoi il est important, quand le cheval bloque, de prendre le temps pour en gagner, si on se place dans une optique d’éducation du cheval, cherchant à lui créer des expériences pour qu’il puisse ensuite dépasser cette « peur ».
Prendre cinq minutes à cheval pour passer un objet insolite ou inquiétant
S’il y a une bâche au milieu du chemin, j’attends de voir à quelle distance mon cheval choisit de s’arrêter pour observer. Il va souffler, reculer, c’est normal. S’il fait demi-tour, je le replace face à la bâche en lui laissant une distance de sécurité. Je peux lui parler, le caresser, et surtout le laisser rênes longues pour qu’il ne se sente pas coincé. Il faut observer son attitude pour savoir quand lui demander d’avancer. Petit à petit, il va approcher. Au moment où il passera la bâche, je peux anticiper et m’attendre à ce qu’il passe vite. Il est intéressant de voir à quel point le cheval apprend vite : la prochaine fois, il passera sans problème.
En randonnée à cheval, les situations intrigantes sont fréquentes. C’est en prenant le temps et en laissant le cheval faire de même qu’on les règle, pour éviter que le cheval associe des sensations désagréables supplémentaires à un objet qui l’inquiète déjà.
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La "peur" chez le cheval : la gestion par le troupeau
Peu importe nos efforts de formation et d’observation des chevaux, on ne parlera jamais aussi bien cheval qu’un autre cheval. Comme lorsqu’on apprend une langue étrangère, on ne parlera pas aussi bien chinois qu’un Chinois et on aura toujours des problèmes d’incompréhension et de malentendus.
Utiliser le troupeau pour gérer la peur du cheval inexpérimenté
Le plus simple pour gérer la « peur » du jeune cheval inexpérimenté en extérieur est d’utiliser le troupeau. C’est la base de l’éthologie scientifique du cheval, puisque le cheval vit en troupeau. On va utiliser un autre cheval comme interprète pour faire passer les messages. Quand un jeune cheval inexpérimenté arrive, on va le mettre dans le troupeau pour qu’il ait des repères, et ensuite le sortir en randonnée et en promenade dans le troupeau, ou du moins avec quelques chevaux expérimentés et référents pour lui.
Limiter le stress pour le jeune cheval
Par exemple, si je passe un pont, ce qui est très commun en randonnée, et que le TGV passe dessous alors que je monte ce jeune cheval, c’est une situation qui va potentiellement l’inquiéter puisqu’il n’y a jamais été confronté. Je vais le mettre au milieu du troupeau de chevaux expérimentés. Les autres chevaux vont être complètement passifs, ils ne vont pas réagir à quelque chose de tout à fait banal pour eux. Le jeune cheval va les imiter et il n’y aura aucun stress pour lui. En quelques minutes, il aura appris que le TGV est inoffensif. La première fois, il va passer au milieu du troupeau. La deuxième fois, il va passer en tête. La troisième fois, il passera seul. On aura créé, grâce au troupeau, un contexte d’expérience et d’apprentissage bienveillant, rassurant, qui ne va provoquer aucun stress chez le cheval.
Utiliser la dynamique du troupeau en randonnée à cheval
En randonnée à cheval, nous allons énormément utiliser la dynamique du troupeau. D’une part parce qu’on considère que la sécurité, c’est au moins deux chevaux. Naturellement, le cheval, dès qu’il est dans le troupeau, est beaucoup moins inquiet et stressé. Ensuite, en randonnée, sur plusieurs jours en ouverture d’itinéraire, nous partons par groupes de deux à quatre cavaliers maximum. Chaque cheval et chaque cavalier passant en tête à tour de rôle, nous allons pouvoir jouer sur la dynamique de troupeau pour garder une fluidité dans le déplacement. Si le cheval de tête bloque, le second va passer en tête. On gère vraiment un troupeau complet, pas des chevaux de façon individuelle, même si chaque cheval va apporter sa personnalité dans le troupeau. C’est forcément plus dangereux d’être seul, puisque le cheval, s’il est inquiet, va avoir envie de rentrer au centre équestre pour retrouver la sécurité du troupeau.
C’est ce qu’explique Véronique de Saint-Vaulry : je pars seule en promenade avec mon cheval, je l’éloigne du troupeau. Sur l’aller de ma promenade, le cheval fait des écarts à chaque caillou et feuille qui tombe. Je fais demi-tour, bizarrement, il n’a plus peur de rien. C’est assez simple : il est sécurisé à vouloir rejoindre le troupeau.
En randonnée à cheval, je peux prendre le rôle du cheval de tête
Si je n’ai pas un cheval expérimenté sur lequel m’appuyer pour apprendre à mon cheval que la bâche au milieu du chemin ne fait pas peur, et si j’ai ce positionnement avec lui qui est rassurant, de leader de troupeau à ce moment-là, je ne dois pas hésiter à mettre pied à terre. En randonnée, il ne faut pas avoir d’ego. Pour nous, le plus important n’est pas de « gagner » contre le cheval mais de se déplacer. A la fois parce qu’on a une étape à faire, mais aussi pour que les chevaux aient le moins de stress possible. Donc je vais prendre le rôle du cheval de tête et lui montrer que la bâche n’est pas dangereuse en passant d’abord.
C’est en troupeau que les chevaux apprennent le mieux : une jeune monture au milieu d’un troupeau expérimenté pendant une balade à cheval découvre que ce qui pourrait potentiellement être inquiétant (TGV, chien…) ne l’est pas vraiment.
Idées reçues sur les chevaux sauvages - 2 video
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